Les édifices qui font partie du groupe que j’ai évoqué, ont en commun un certain nombre de critères.
→ Le plan : c’est un plan en double boite, terme employé par Pauline de La Malène (6), qui convient pour décrire une nef unique articulée à un chevet quadrangulaire et surélevé, sans transept.
Ce plan correspond à celui des premiers édifices en Occident, héritage du plan basilical romain, dans le cadre de la christianisation et des premières paroisses en particulier en milieu rural. Ce plan a déjà été décrit en Espagne (7) et en Septimanie (8). La nef est toujours plafonnée et le chœur toujours voûté.
Les dimensions sont, à quelques variantes près, toujours les mêmes : la nef mesure 10 m de long et 5 m de large et le chœur fait 4m50 de large au maximum. L’orientation obéit dans la grande majorité des cas à un grand axe est-ouest.
Ce plan se retrouve dans toutes les églises d’époque préromane affirmée ou supposée dans le Rouergue. Elles sont nombreuses avec des chaînages droits, mais dans le groupe que j’évoque, sont présents des angles arrondis.
→ Les angles arrondis : vocabulaire architectural totalement inédit, on les voit aux angles de la nef et du chevet, et du raccordement nef-chevet. Au chainage droit est substitué un chaînage arrondi fait de moellons de calcaire, grossièrement taillés et très vraisemblablement pris sur place dans les strates rocheuses et les pierrées.
Les autres caractéristiques sont :
→L’élévation : elle est considérable, atteignant pour certaines 11 mètres du sol primitif (quand-il est connu) jusqu’au faîtage, ce qui est étonnant pour des édifices sans le moindre contrebutement, ayant malgré tout traversé plus de 10 siècles. Certes la maçonnerie est conséquente (1m en moyenne), faite de parement en simple appareil et d’un remplissage grossier de mortier de chaux et de tout venant.
→ Les ouvertures : elles sont réduites au minimum et contribuent à donner au bâtiment un incontestable aspect fortifié, qui pour certains, traduit la grande peur de l’an Mil.
Au niveau du chevet, un oculus ou une étroite baie verticale couverte d’un linteau monolithe échancré apporte la lumière du levant. Dans la nef de simples ouvertures type meurtrière très haut placées.
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Un arc rayonnant retombant en dehors des pieds-droits donne l’aspect d’un faux outrepassement, il s’agit d’un arc en gouttière ou en trou de serrure dont nous verrons plus loin l’importance. A l’ouest une ouverture souvent très postérieure est à noter dans plusieurs édifices.
→ A l’intérieur : le cloisonnement nef-chevet est souvent saisissant, permettant de visualiser l’élévation.
→ Les arcatures géminées aveugles (9) : une constante dans ce groupe, toujours géminées avec colonnes et chapiteaux. Elles évident les bases des supports du chœur. Elles sont l’héritage de celles que l’on voit dans des bâtiments plus anciens : cryptes ou baptistères.
→ L’arc triomphal : son analyse archéologique stricte est difficile à appréhender car les modifications ultérieures, voire les destructions et les reconstructions, ne permettent pas une approche fiable de l’état d’origine. Il faut retenir l’importance du cloisonnement nef-chœur qu’il entraine au travers d’une incontestable massivité. Si, le plus souvent, il est amorti d’un arc doubleau, dans certains cas, une tendance à l’outrepassement permet de conforter quelque peu l’hypothèse d’une influence wisigothique dans cette architecture inédite. Un chancel était très vraisemblablement fréquent.
→ L’autel : on ne connait que quatre exemples, situés au centre du chœur, constitués d’une maçonnerie rustique avec une fosse à reliques ou à libation. Tous ont été très restaurés, ce qui ne permet pas de généraliser cet élément ô combien important.